Institut des Territoires Coopératifs

26 mars 2016 – ‘entre-deux’ et ‘entre-trois’

20km entre Vieillevigne et Legé. Depuis que nous avons quitté l’espace de la métropole Nantaise, nous avons l’impression d’être dans une sorte de territoire “intermédiaire”, qui semble comme laissé à lui-même, et sans appartenance. Nos hôtes de la ferme de l’écorce à Vieillevigne, nous parlent de la difficulté d’être rattaché à un territoire administratif (Loire-Atlantique, Pays de Clisson) faisant partie du pays du vignoble nantais, alors que nous sommes déjà dans le bocage vendéen.

Trop loin de Nantes, trop loin du cœur de la Vendée, le territoire semble être oublié. On retrouve fréquemment ce phénomène des territoires intermédiaires dans notre pays : à la fois trop loin pour rester au cœur des préoccupations, et pas assez loin pour être vu comme original et traité comme tel. Des territoires dont les acteurs eux-mêmes semblent endormis ou impuissants face à l’inertie ambiante. Les politiques d’aménagement du territoire qui aujourd’hui donnent la part belle à la métropolisation. Ce phénomène risque fort de s’accentuer.

Par contraste, ‘entre-trois’ est différent d”entre-deux’ ! Les habitants du territoire de Redon où nous sommes passés le 14 mars expliquent au contraire le dynamisme de ce pays par son écartèlement entre 3 départements (Morbihan, Ille-et-Vilaine, Loire-Atlantique), et 2 régions (Bretagne et Pays de Loire), qui incite les acteurs à chercher des partenaires, et probablement stimule ces dernier à mettre en place des coopérations vertueuses.

Hyperacousie, compréhension humaine et coopération

Claire, notre hôte de ce jour de la Ferme de l’Ecorce, souffre d’hyperacousie, « un dysfonctionnement de l’audition caractérisé par une hyper-fragilité de l’ouïe. Une personne atteinte d’hyperacousie ne pourra pas tolérer certains sons ou certains environnements bruyants. » (Wikipédia).

Pour elle, pas de cinéma. Pas de marche sur les graviers. Pas de repas de famille prolongés. Pas de promenade pour écouter les oiseaux. Pour l’organisation du repas des premières assises des personnes atteintes de ce dysfonctionnement, il a fallu choisir des assiettes en carton (pas de porcelaine, ni de plastique crissant), des couverts non métalliques, et même travailler avec le traiteur pour qu’il évite les aliments croquants.

Notre hôte nous parle de la difficulté d’être entendue (c’est un comble pour celle qui entend « trop ») par les pouvoirs publics pour l’aménagement des lieux, ou même par les médecins : ceux qui, au départ, s’intéressent au problème, finissent au mieux par s’en détourner, au pire par le rejeter, tant ils sont démunis par ce problème sans solution.

Cet échange illustre parfaitement la distinction essentielle, entre la compréhension intellectuelle des choses, et la compréhension humaine. S’il est, pour une personne ne souffrant pas d’hyperacousie, possible d’imaginer intellectuellement telle ou telle situation, il demeure impossible de ressentir ce que l’autre ressent. On ne peut ni en faire soi-même l’expérience, ni voir chez l’autre, l’expression de ce ressenti. C’est comme si l’on se retrouvait simplement privé de sa capacité à entrer en empathie avec l’autre, puisque ne pouvant comprendre ses sentiments et émotions. Or, l’empathie est essentielle dans la communication avec autrui. Devant la difficulté d’entrer alors en relation avec l’autre, certaines personnes s’en détourneront, d’autres iront même jusqu’à le rejeter. Sans empathie, pas de communication. Sans communication, pas d’échange. Sans échange, pas de coopération. On comprend alors pourquoi il est essentiel de chercher à accéder à la compréhension humaine si l’on veut développer des environnements coopératifs.

L'InsTerCoop est un laboratoire d’action-recherche sur le processus coopératif, et un centre de ressources et de ressourcement au service des personnes, des organisations et des territoires pour croître en maturité coopérative et faire de la coopération une source de développement et d’épanouissement.