Alliances et Engagement
Le 22 janvier, l’InsTerCoop intervenait lors de l’Atelier « Alliances et Engagement » organisé par le Rameau dans le cadre de l’Observatoire des partenariats ». Nous étions appelés à dire si selon nos travaux, les alliances permettent de renforcer l’engagement des acteurs. Nous répondons à la question, puis faisons un pas de côté en interrogeant s’il peut y avoir alliance (et coopération) sans engagement.
A l’Institut des Territoires Coopératifs nous explorons les rouages profonds de la coopération au service du « comment coopérer ». Cela nous amène à explorer les moteurs de l’engagement, individuel et collectif.
Pour ce faire, nous avons créé l’Observatoire de l’Implicite : une démarche d’itinérance à la rencontre de collectifs coopératifs, quelle que soit leur objet, quelle que soit leur forme. A ce jour, nous avons rencontré environ 50 collectifs soit plus de 350 personnes.
Les deux caractéristiques majeures notre travail sont d’explorer ce que nous avons appelé l’implicite, c’est-à-dire ce qui est là, mais ne se voit pas nécessairement et dont on ne parle pas, et d’explorer les récursions entre trois niveaux : le niveau individuel, le niveau collectif et le niveau territorial. Par exemple, en quoi le collectif fait de moi un individu différent, et en quoi l’individu transforme le collectif, en quoi le territoire me transforme, etc.
Quel impact des alliances sur l’engagement ?
Nous avons observé que les environnements à forte maturité coopérative, sont des environnements épanouissants pour les personnes. C’est d’ailleurs pour cela que nous avons choisi le mot de maturité pour les décrire, puisque atteindre la maturité selon le dictionnaire, c’est atteindre le plein épanouissement.
Pourquoi sont-ils épanouissants ? Parce que ce sont des environnements apprenants, dans lesquels on peut prendre des responsabilités (du leadership) et où l’action est au service d’une œuvre commune, une œuvre qui a du sens pour les personnes et leur permet de se déployer, de se réaliser.
Donc oui, les alliances peuvent favoriser et renforcer l’engagement ; tout dépend bien sûr de la qualité du processus de coopération au cœur de cette alliance.
Permettez-moi de renverser la question. Peut-il y avoir « alliance », s’il n’y a pas engagement. Les alliances que le Rameau étudie sont des alliances entre personnes morales. Mais en fait, ce sont toujours des personnes physiques qui décident de ces alliances et les créent, et d’autres personnes physiques qui les font fonctionner. Sans engagement de ces personnes, il n’y a qu’une alliance de papier. C’est l’engagement des personnes qui créent la véritable alliance.
Pour que cet engagement existe, il est nécessaire que l’alliance nourrisse les valeurs et aspirations de ces personnes. Je ne parle pas ici des valeurs proclamées, mais des valeurs vécues au plus profond de soi, qui restent le plus souvent dans l’implicite, et souvent même, dans le non-pensé. Nos travaux montrent qu’il est nécessaire de recourir à une réelle introspection pour les mettre en lumière.
Lorsqu’il y a décalage entre les valeurs proclamées par l’alliance et les aspirations profondes des personnes, le PFH dont Patrick Viveret parlerait devient le Putain de Facteur Humain. C’est dans ces cas-là que le bénévolat peut devenir du « malévolat », parce que les attentes de sens et de reconnaissance des personnes ne sont pas nourries par l’alliance, et doivent donc être nourries autrement. En revanche, lorsqu’il y a adéquation entre les valeurs vécues par l’alliance et les aspirations profondes de sens des personnes, le PFH devient le Précieux Facteur Humain et l’engagement des personnes renforce l’alliance.
Pourquoi plaçons-nous la coopération, c’est-à-dire le fait d’être co-auteur d’une œuvre commune, au cœur des alliances ? Parce que c’est l’œuvre qui va relier alliance et engagement, et c’est la qualité du processus coopératif qui va faire vivre cette récursion entre alliance et engagement : dans laquelle l’alliance renforce l’engagement et dans laquelle l’engagement fait vivre l’alliance.