Institut des Territoires Coopératifs

Autosuffisance et coopération

Nous le savons tous : les femmes et les hommes façonnent leur territoire. Nous ne pensons pas toujours à la réciproque : les territoires façonnent également les comportements de ceux qui les habitent. Tout au long de nos itinérances, nous voyons la marque de cette relation à double-sens entre l’Homme et son territoire.

En Lot-et-Garonne par exemple, l’habitat est dispersé, les fermes, éloignées les unes des autres, sont en général entourées des terres. La polyculture traditionnelle y est encore très présente. En 1945, un géographe, M. Luxembourg, écrivait sur ce territoire : « Ainsi, le morcellement apparaît, dans une large mesure comme déterminé par ces vieilles traditions qui ne sont, au fond, qu’une survivance de l’économie fermée, qu’un reflet aussi de cet individualisme qui tend à se suffire à lui-même et qui a engendré un système agraire, dont la polyculture, si tenace, n’est qu’un des principaux aspects… Plus encore que les clôtures, la pleine liberté de travail et de mouvement traduit cet individualisme dont nous avons parlé. Il n’existe, ici, aucune obligation d’assolement. Chacun organise la rotation de ses cultures comme il l’entend. »

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Nous voyons des expressions multiples de cet individualisme. Près des bourgs et des villages par exemple, le mitage semble en progression constante, avec une caractéristique étonnante (et que nous n’avons pas vu ailleurs dans une telle mesure) : le nombre de propriétés closes, avec à l’entrée, les statues de deux aigles ou lions qui marquent les limites de la propriété. A l’échelle institutionnelle, nous voyons également au cours de nos randonnées de multiples signes de la concurrence entre les territoires et les collectivités.

Lors de notre itinérance en Pays de la Loire, nous avions remarqué que le débordement du fleuve amenait depuis des siècles, des pratiques des gestions collectives de l’espace commun, se traduisant par exemple au niveau individuel par une gestion collective des rotations des cultures et au niveau institutionnel par la création de 24 « communes nouvelles » en 2016, rien que sur le département de Maine-et-Loire.

Ces différences culturelles sont profondes. Le modèle de petites communautés familiales auto-suffisantes a certainement créé une capacité de résistance aux épreuves, de résilience, de compétition. Il n’a pas développé autant qu’ailleurs les capacités de coopération. C’est sans doute un enjeu qu’il faudra relever pour mettre en place une politique touristique cohérente et transverse sur l’ensemble du département, qui s’affranchisse des frontières institutionnelles et autres limites géographiques, thématiques, professionnelles ou autres.

L'InsTerCoop est un laboratoire d’action-recherche sur le processus coopératif, et un centre de ressources et de ressourcement au service des personnes, des organisations et des territoires pour croître en maturité coopérative et faire de la coopération une source de développement et d’épanouissement.